CyclOpe 2024

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Attendre et espérer"

Publication du Rapport

Cyclope 2024

14 Mai 2024 - Paris

CyclOpe 2023

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Les cavaliers de l'Apocalypse"

Publication du Rapport

Cyclope 2023

23 Mai 2023 - Paris

CyclOpe 2022

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Le monde d'hier »

Publication du Rapport

Cyclope 2022

8 Juin 2022 - Paris

CyclOpe 2021

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Cette obscure clarté qui

tombe des étoiles »

Publication du Rapport

Cyclope 2021

26 Mai 2021 - Paris

 

CyclOpe 2020

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Allegoria ed effetti
del Cattivo Governo -Ambrogio Lorenzetti 
»

Publication du Rapport

Cyclope 2020

09 juin 2020 - Paris

CyclOpe 2019

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Les illusions perdues »

A l'occasion de la publication du Rapport Cyclope 2019

15 mai 2019- Paris

CyclOpe 2018

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Le ciel rayonne, la terre jubile »

A l'occasion de la publication du Rapport Cyclope 2018

16 mai 2018 - Paris

CyclOpe 2017

 

LES MARCHES MONDIAUX

« Vent d'Est, Vent d'Ouest »

A l'occasion de la publication du Rapport Cyclope 2017

15 mai 2017 - Paris

CyclOpe 2016

 

LES MARCHES MONDIAUX

« A la recherche des sommets perdus »

A l'occasion de la publication du Rapport Cyclope 2016

24 mai 2016 - Paris

CyclOpe 2015

LES MARCHES MONDIAUX

Pour qui sonne le glas ?

A l'occasion de la publication du Rapport Cyclope 2015

20 mai 2015 - Paris

CyclOpe 2014

LES MARCHES MONDIAUX

Dans le rêve du Pavillon Rouge

A l'occasion de la publication du Rapport Cyclope 2014

14 mai 2014 - Paris

 

1er décembre

          L’Europe est-elle enfin dans la dernière « ligne droite »? Il règne en tout cas une curieuse ambiance. Personne n’hésite plus à parler ouvertement de la fin de l’euro à l’image d’un curieux texte de « fiction » publié par « Paris Match », un hebdomadaire qui ne brille pas d’habitude par la qualité de ses analyses économiques et qui imagine la fin de l’euro après un ultime « nein » de la chancelière allemande.

          Les réunions et autres sommets se succèdent. Ce soir à Toulon, Nicolas Sarkozy a esquissé des pistes sans aller toutefois au bout de la logique fédérale. L’Allemagne continue à mettre la pression sur les contraintes budgétaires tout en ne souhaitant pas d’engagement formel de la part de la BCE. Pour les Allemands, le pouvoir suprême doit revenir à des cours de justice indépendantes de l’exécutif et promptes à sanctionner tout dérapage en dehors des engagements institutionnels. Tout va se jouer dans les prochains jours sur la crédibilité de ce couple improbable Sarkozy/Merkel, sur leur capacité à donner une chair politique à cet ultime sauvetage de l’euro qui ne peut se faire en réalité que par une « sortie par le haut » pour l’Europe avec à la clef un peu plus de fédéralisme et des abandons de souveraineté.

          Les banques centrales de la planète ont en tout cas fait un geste en intervenant de manière concertée afin de donner un peu de liquidité en dollar à des banques européennes asphyxiées. « It’s Lehman Time for Europe ». Is it “vraiment” ?

 

2 décembre

          Les OGM reviennent à la une de l’actualité. Le Conseil d’État vient d’annuler le moratoire sur le MON 810 pris par la France en 2008. Il a suivi l’avis de la Cour de Justice européenne qui estimait que la preuve d’un niveau de risque élevé pour la santé ou l’environnement n’avait pas été apportée.

          Ceci me ramène quelques années en arrière puisque le dossier du MON 810 avait été le premier à être traité par le Haut Conseil des Biotechnologies, l’organisme créé par le Grenelle de l’Environnement pour rendre des avis sur l’autorisation des OGM. À l’époque le comité scientifique avait rendu un avis neutre; sur la santé humaine, le dossier était vide; sur l’environnement le seul risque était que les insectes puissent développer une sorte de tolérance à la toxine produite par ce maïs. Par contre, le comité économique, éthique et social, dont la composition résultait des compromis du Grenelle (le nucléaire versus les OGM), avait émis un avis négatif : ce fut d’ailleurs là, la seule fois que la procédure du vote fut employée afin de montrer que l’avis rendu était loin de faire l’unanimité. Le MON 810 fut donc interdit.

          Que va-t-il se passer maintenant? En pleine campagne électorale, le gouvernement a courageusement annoncé la mise en place d’un nouveau moratoire. Et il faudra encore du temps pour le Conseil d’État l’annule!

          En France, le dossier OGM est un dossier politique et seulement politique : un de plus oserait-on dire!

 

3 décembre

           « Intouchables » a dépassé les 10 millions de spectateurs en France. C’est là le phénomène cinématographique de l’année : un film sympathique racontant une histoire improbable, mais vraie d’amitié entre un riche infirme et un « black » des banlieues. Le film est réussi et échappe à la mièvrerie et au sentimentalisme. Il ne juge pas, mais montre avec réalisme les banlieues et leurs trafics. Toutes ces qualités sont pourtant insuffisantes pour expliquer pareil succès. « Intouchables » est en fait sorti exactement au moment où les Français avaient besoin de voir un tel film. Un film est souvent de manière inconsciente le reflet d’une époque.

          En cet automne 2011, le chômage et la précarité sont à nouveau au rendez-vous. L’échec de la politique du gouvernement dans les banlieues est manifeste : l’insécurité n’y a jamais été aussi grande ni la criminalité aussi forte. Plutôt que l’arsenal du tout répressif qui a montré ses limites, les Français veulent croire à la main tendue, à la force au fond de l’amour du prochain. En plébiscitant Intouchables, il rêve d’une France qui réussirait enfin à intégrer tous ses enfants.

          Le succès d’Intouchables rappelle celui d’Amélie Poulain, il y a plus de dix ans, à l’époque de la France « Black, Blanc, Beur » alors que tout le monde rêvait, à l’image de la jolie Amélie, de faire le bonheur de son entourage.

          La seule différence est qu’en 2000 la croissance fut de 4 %.

 

 

6 décembre

          Les rencontres parlementaires sur l’agriculture durable n’ont pas attiré la grande foule et la moyenne d’âge dans la salle est inquiétante tant elle montre que les débats agricoles sont désormais le fait des générations les plus anciennes. Faut-il s’en étonner ?

          L’agriculture peine à attirer les jeunes et surtout ceux qui se sentent entrepreneurs. L’image trop souvent véhiculée est celle d’une agriculture qui doit tourner le dos à la modernité, qui doit se plier aux caprices d’écologistes prônant un hypothétique retour à des pratiques « naturelles » : bien entendu, l’heure est au verdissement de la PAC : quels que soient les sols, on décrète une base d’assolement de quatre cultures ; le bio et le « hve » (haute valeur environnementale) doivent être privilégiés ;  certaines zones doivent être classées « zone de régulation écologique ». On aurait presque envie de dire réserves d’indens ! On ne s’étonnera donc pas qu’il n’y ait pas beaucoup de volontaires pour jouer à l’indien !

          Même raisonnable, le discours écologique (représenté aujourd’hui par France Nature Environnement) se fait dominateur face à un monde agricole sur la défensive. Le vent souffle de leur côté à quelques mois d’élections qui pourraient consacrer leur victoire et ce d’autant plus qu’entre le nucléaire et l’agriculture, le choix ne fait pas de doutes.

 

7 décembre

          Accord franco-allemand sur l’Europe. Finalement Angela Merkel a dit « ja » alors que nombre d’observateurs pronostiquaient un « nein » fatal. Elle a tenu bon sur son refus des euro-obligations, mais pour le reste la convergence franco-allemande apparait à peu près totale.

          Il était grand temps, car les agences de notation, au même moment, plaçaient sous surveillance tous les AAA de la zone euro, Allemagne comprise. En préparation d’un nouveau sommet « décisif » à Bruxelles, on sent que la tension a atteint son paroxysme en Europe avec des marchés d’une extrême nervosité et ce d’autant plus que le cadre institutionnel d’un éventuel accord (17 ou 27, simple modification d’un texte ou nouveau traité soumis à un referendum de ratification) ne fait pas l’unanimité alors même que se profile une épine britannique.

          L’accord franco-allemand ne va pas très loin en termes institutionnels : le fédéralisme européen ne progresse guère et on reste loin d’un véritable « Trésor » européen, mais les ingrédients sont là et surtout Nicolas Sarkozy a réussi à entraîner Angel Merkel bien au-delà de ce que la chancelière aurait pu concéder il y a seulement quelques semaines. À suivre !

 

9 décembre

          Vingtième anniversaire du traité de Maastricht ! Dans l’aube blême de Bruxelles, le sommet européen s’est terminé vers cinq heures du matin, par un accord entre les 17, élargi à presque tous les autres à une exception majeure près, le Royaume-Uni.

          La zone euro s’est dotée de mécanismes contraignants, complétant en quelque sorte ce qui n’avait pas été fait à Maastricht : la règle d’or de l’équilibre budgétaire devient passible de sanctions et un subtil équilibre semble avoir été trouvé entre la Commission, les États et la Cour de Justice européenne (trop subtil peut-être).

          Mais la grande nouvelle, c’est la sortie britannique. David Cameron, qui doit tenir compte de ses « backbenchers » eurosceptiques, avait mis très haut aux enchères le prix de son adhésion : la liberté de régulation pour la place financière britannique. Bien entendu, les continentaux ont refusé ce chantage et le Royaume-Uni s’est drapé dans son splendide isolement.

          Il en est probablement mieux ainsi tant les britanniques ont contribué au « pourrissement » de l’Europe. Toutes les grandes avancées européennes, de la PAC à l’euro, se sont faites sans eux alors qu’ils ont su noyauter les instances bruxelloises. Il était grand temps que le passager clandestin de l’Europe débarque. Et en plus, il l’a fait de son propre chef.

 

10 décembre

          Voilà un autre accord au forceps après des heures de négociations, mais cette fois, à l’africaine. À Durban, la conférence sur le changement climatique est parvenue à se mettre d’accord sur la poursuite du protocole de Kyoto sans beaucoup de contraintes nouvelles pour les gros pollueurs des États-Unis à la Chine.

          Lancée dans l’enthousiasme, les négociations sur le changement climatique se sont enlisées dans un dramatique processus « onusien » conjuguant irresponsabilité et inefficacité. Il y a un an à Cancún, la présidence mexicaine avait obtenu un compromis acceptable. Il semble que cette année la présidence sud-africaine a mal maîtrisé la « palabre » : palabre en effet entre 194 pays, des milliers d’ONG plus ou moins représentatives d’une hypothétique société « civile » et quelques diplomates professionnels chargés de trouver les éléments de langage sur lesquels bâtir un texte ne heurtant personne et préservant l’avenir. Tel est le cas de cet accord de Durban qui, l’encre à peine sèche, fera l’objet de nouvelles négociations. Une chose est certaine en effet : la « trace carbone » des sommets de la terre et du climat ne cesse d’augmenter. C’est ce que l’on appelle le « climate jet set ».

 

11 décembre

          Beaucoup d’élections en Afrique : Congo, Côte d’Ivoire, Égypte. Si en Côte d’Ivoire, la situation – après l’exfiltration de Laurent Gbagbo vers la Cour de La Haye – semble à peu près sous contrôle, tel n’est le cas ni au Congo, ni en Égypte. Dans ces deux pays, les hommes au pouvoir ne veulent en lâcher aucune bribe en s’appuyant auprès de la communauté internationale sur les risques qu’impliquerait un changement de régime. En Égypte, l’armée se positionne toujours comme un rempart contre les partis islamistes (qui seraient majoritaires à l’image de la Tunisie et même du Maroc) alors qu’elle cherche avant tout à protéger son emprise économique. Au Congo, Kabila veut tout simplement conserver le pouvoir à l’image de tout bon dictateur qui se respecte. Certes, ni les salafistes égyptiens, ni l’inoxydable opposant Tshisekedi (ancien ministre de Mobutu…) au Congo n’inspirent grande confiance. Dans le cas du Congo, on ne sait ce qui est le pire : la poursuite du régime corrompu de Kabila ou l’arrivée de nouveaux prédateurs.

          Ceci pose bien sûr la question du fait démocratique dans des sociétés peu préparées à un exercice qui même en Occident montre souvent ses limites.

 

12 décembre

          Retour sur un week-end à Vienne où se tenait la World Policy Conference organisée par l’IFRI que préside Thierry de Montbrial. Dans ce genre de réunions, on glane des idées, des concepts parfois brillants qu’il faut ensuite décrypter et bien souvent mettre de côté. « L’Europe peut-elle être le défi politique le plus important du moment, elle n’est plus – et de loin – le centre du monde » dit Jacob Frenkel, le président de J.P. Morgan (et ancien gouverneur de la Banque d’Israël). C’est peut-être le message le plus important en cette vieille capitale de la « little europa ». Ce n’est pas nouveau, mais il faut encore le marteler : et l’Europe doit s’interroger sur son destin : celui d’une grande Suisse à l’échelle de la planète, d’un « mall » touristique pour asiatiques et américains en goguette, ou bien celui d’un espace politique cohérent, de véritables États-Unis d’Europe, à la démographie certes vacillante, mais capables encore d’influencer la scène mondiale y compris sur le plan scientifique et technologique. Le problème est que l’Europe demeure divisée et surtout déséquilibrée : « There are big gaps in the family » nous dit notre banquier américain sous un immense portrait de François Joseph qui régna sur l’un des empires les plus multinationaux de l’histoire. Mais le monde, alors, dansait la valse.

 

13 décembre

          Discussion au Conseil d’Analyse Economique autour d’un projet allemand de gestion du problème de la dette européenne : il s’agirait de la cantonner dans un fonds dépassant les 2000 milliards d’euros qui serait à peu près remboursé vers 2035. Le système est complexe et sa faisabilité nous laisse dubitatifs. Sur le même principe, l’idée de l’économiste Jacques Delpla de séparer la dette « bleue », jusqu’à 60 % du PIB et bénéficiant de la pleine garantie européenne de la dette « rouge » au risque des États, est à la fois plus simple et plus prometteuse.

          La réalité est pourtant qu’il va falloir passer par les fourches caudines des blocages allemands qui ont leurs racines dans le lointain passé de l’hyperinflation de 1923. Il est de ce fait totalement impossible d’imaginer un mécanisme qui pourrait être permanent : le problème de la dette doit être géré par une structure temporaire de manière à ne pas poser de problèmes constitutionnels. Quant à proposer des euro-obligations aux Allemands (un autre nom pour les Bons du Trésor…), c’est comme agiter sous leur nez une carte de crédit dont le seul payeur serait l’Allemagne.

          L’Allemagne, la fourmi de l’Europe, impose ainsi aux cigales ses propres contraintes et surtout ses propres angoisses. Les frimas économiques venus, les cigales doivent obéir.

 

14 décembre

          Voilà donc une nouvelle page de la mondialisation ! La Chine s’intéresse au football et s’offre pour $ 250 000 par semaine une « vieille » star du football français qui n’a jamais tenu ses promesses, Nicolas Anelka.

          Pour l’instant, le sport le plus populaire au monde n’a guère percé en Chine et la sélection nationale s’est récemment fait battre par… l’Irak ! Le football a une réputation de sport gangréné par une corruption bien supérieure au niveau normalement admis en Chine. Pour lancer un championnat digne de ce nom, les sponsors s’agitent et mettent la main au portefeuille. Voilà comment on décroche de grands noms. Néanmoins, les sommes en jeu sont sans commune mesure avec ce que l’on dépense même sur les championnats américains et japonais, eux aussi spécialistes du recyclage des vieilles « stars » européennes. C’est qu’avec la Chine, on le sait, tout peut être vite démesuré…

          La planète football est d’ailleurs un bon indicateur des tensions de la mondialisation. Alors qu’Anelka part en Chine, un oligarque russe, Dmitri Rybolovlev, pas un des plus connus, mais le « roi de la potasse » quand même, s’offrirait l’AS Monaco, le club emblématique de ce sympathique paradis fiscal qui ne joue plus qu’en deuxième division du Championnat de France. La géographie du sport rejoint celle des matières premières, mais le sport est au fond une commodité !

 

16 décembre

          La France est en récession ! L’INSEE vient de l’annoncer implicitement avec une prévision négative pour le dernier trimestre de 2011 et le premier de 2012 : deux trimestres de suite et, le couperet de la récession peut tomber. Mais ceci ne fait au fond que confirmer une ambiance qui n’a cessé de se dégrader depuis quelques semaines : l’économie ne crée plus d’emplois depuis cet été et c’est là le signe incontestable d’une récession que nous allons d’ailleurs partager avec beaucoup de nos voisins européens.

          Est-ce bien le moment pour parler de rigueur et de réduction des dépenses publiques ? Ainsi la carte des suppressions de postes dans l’enseignement vient d’être publiée : on sait que c’est là un point de divergences entre les deux candidats majeurs à la présidentielle, François Hollande voulant revenir en arrière sur la suppression de 60 000 postes. Il faut bien sûr supprimer les postes inutiles et… Dieu sait qu’ils sont nombreux au sein d’un « mammouth » qui a multiplié les détachements en tous genres. On peut certainement faire aussi bien, voire mieux, à budget constant. Faut-il pour autant agiter le chiffond rouge et surtout décider de manière jacobine ce qui doit être fait région par région puis école par école ? Ceci ne fait que renforcer l’effet de crise, l’impression de panique face au gouffre des dépenses publiques. J’ai peur qu’en France, on ne sache guère que manier ce genre de gros bâton à l’efficacité douteuse, mais dont l’effet récessif est garanti.

 

17 décembre

          La VIIIe conférence de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) vient de se terminer à Genève. D’habitude, ces réunions sont marquées de contestations violentes et de manifestants enchaînés aux grilles des parcs de Genève pour mieux fustiger l’hydre mondialiste et néolibérale. Mais cette fois-ci, rien : certes, les altermondialistes sont fatigués, mais l’OMC, elle, est épuisée à l’image de son directeur général Pascal Lamy qui a annoncé son départ pour 2013.

          Regardons quand même les bonnes nouvelles : les Samoa, le Monténégro et surtout la Russie ont rejoint l’OMC. Dix ans après la Chine, la Russie vient donc d’adhérer à ce qui fut longtemps le « club » des pays occidentaux : c’est ainsi le dernier symbole de la grande période de la guerre froide entre l’Ouest et l’Est qui disparaît. Voilà pour la bonne nouvelle qui ne changera pas la face du monde tant la Russie compte peu dans le champ du commerce international si l’on en excepte les matières premières.

          Quant aux mauvaises nouvelles, il s’agit en premier lieu de l’enterrement du cycle de Doha qui a justement fêté son dixième anniversaire. Ce genre de grande négociation fourre-tout n’est probablement plus adapté à la réalité des échanges mondiaux tant matériels qu’immatériels. Mais de Durban à Doha en passant par le G20 que d’échecs pour une gouvernance internationale qui est pourtant plus nécessaire que jamais.

 

19 décembre

          La mort de Kim Jong-Il ne peut vraiment faire couler de larmes en dehors de la Corée du Nord tant le dictateur ubuesque laisse son pays dans la misère et l’échec tant économique et social que politique. Pourtant les larmes des Nord-Coréens n’étaient probablement pas feintes et elles nous renvoient un peu plus d’un demi-siècle en arrière au lendemain de la mort de Staline. Les scènes de désespoir en URSS et dans le monde entier (la une de l’Humanité en France avec les hommages des intellectuels) n’étaient pas feintes elles non plus et montraient bien l’impact qui était alors celui du totalitarisme. Quelques années plus tard, il en fut de même en Chine autour de Mao dont le culte s’est fait aujourd’hui bien plus discret.

          Le XXIe siècle pourra-t-il être exempt de ces hallucinations collectives mêlant un peu d’idéologie et beaucoup de terrorisme d’état ? Rien n’est au fond moins sûr et il suffit de s’intéresser à maintes élections africaines ou moyen orientales, partout en fait où la notion d’état de droit est vide de sens. C’est notamment le cas là où le terrorisme religieux est devenu dominant.

          Pour un Kim Jong Il tellement caricatural qu’il en faisait sourire, combien de dictateurs tout aussi brutaux et sanguinaires, mais que leur pétrole, leur gaz naturel ou leurs ressources minières rendent fréquentables comme en Asie centrale où, à la manière de la Corée du Nord, le communisme est devenu dynastique.

 

21 décembre

          Le « come back » médiatique de DSK pouvait être difficilement plus mal choisi : il a en effet cédé aux sirènes d’un « ménage » (probablement fort bien rémunéré) pour une entreprise chinoise à Pékin. Qu’il se positionne ainsi sur le « circuit » des conférences à l’instar d’un Bill Clinton ou d’un Tony Blair serait au fond tout à fait normal, mais qu’à Pékin, il en profite pour enfoncer un peu plus l’Europe est indécent. Au même moment, Jean-Claude Trichet s’interdit toute prise de parole publique pour ne pas compliquer la tâche de son successeur.

          Mais la charge de DSK est aussi injuste. Il est facile en effet de critiquer le tandem Sarkozy-Merkel, de regretter que les dirigeants européens n’aient pas fait le grand saut vers une Europe fédérale partageant au moins des finances et un budget. Il est toujours plus facile de trouver le verre à moitié vide qu’à moitié plein. L’analyse de DSK est juste et n’a rien d’original tant nous sommes nombreux à faire pareil constat. Mais nous divergeons sur les conclusions : l’Europe peut passer ces nouveaux récifs. Il suffira d’un peu de souplesse de la part de la BCE et puis surtout d’un projet politique clair capable de faire oublier une rigueur certes nécessaire, mais qu’il est inutile d’exagérer. Et puis oublions aussi DSK…

 

23 décembre

          Les derniers soldats américains quittent l’Irak, 3196 jours après une guerre éclair qui avait fait tomber le régime de Saddam Hussein. Le bilan de cette guerre est calamiteux et ne peut en aucune manière justifier les 4500 soldats américains tués et les mille milliards de dollars dépensés par le contribuable américain (au prix de l’endettement des États-Unis).

          Avec le recul, la décision de George Bush et de ses faucons apparait non seulement catastrophique, mais aussi absurde. Saddam Hussein était un dictateur, mais guère pire que Kadhafi ou Assad, pas plus dangereux que les mollahs iraniens ou les princes du Golfe. Il régnait sur un Irak, création bien artificielle du Traité de Versailles, à peine sorti de l’anarchie tribale et les vapeurs du pétrole lui avaient permis toutes les folies. On le sait aujourd’hui, son programme nucléaire avait depuis longtemps avorté et le tandem Bush/Blair a sciemment manipulé l’information le concernant.

          Mais le pire n’est pas là : le pire c’est l’incapacité à rebâtir quelque chose de cohérent en Irak, c’est la volonté – tout comme en Afghanistan d’ailleurs – d’y plaquer une démocratie artificielle sur un patchwork de religions, de races et de tribus.

          Il n’est même pas sûr que l’objectif des faucons du Texas – prendre le contrôle du pétrole irakien – ait été atteint. Les États-Unis ont perdu sur toute la ligne y compris leur honneur. Quant aux Irakiens, ils ont perdu leur espérance !

 

27 décembre

          Toujours dans le Golfe, les bruits de bottes viennent maintenant d’Iran avec un scénario presque identique à celui de l’Irak d’il y a dix ans : une menace nucléaire – cette fois-ci beaucoup plus sérieuse – ; un régime en pleine dérive paranoïaque ; du pétrole et en plus une forte capacité de nuisance autour du détroit d’Ormuz.

          Paradoxalement, la dimension religieuse ne semble pas essentielle et on voit en fait ressurgir le vieil antagonisme entre la Perse et le monde arabe, soutenu par le monde occidental beaucoup plus pour son pétrole que pour ses vertus démocratiques. Quant à l’Iran, sa dérive ne peut qu’inquiéter : la théocratie vire à l’affairisme ; l’économie est au point mort et il faut du pétrole à plus de $ 80 le baril pour équilibrer un budget exsangue. Le régime est pris dans une course en avant pour éliminer toute forme d’opposition, mais surtout pour trouver des boucs émissaires responsables de toutes les carences du pays : les occidentaux, les juifs, toutes les autres religions…

          Quel est l’état exact du potentiel nucléaire iranien ? Faudrait-il le détruire de manière préventive ? Qui peut frapper ? Que doit faire Israël ? Voilà quelques-unes des questions majeures pour la géopolitique de 2012 !

 

29 décembre

          L’euro a dix ans. Tous les journaux y vont de leur enquête sur ces dix dernières années de monnaie européenne. Curieusement, la première question posée dans les interviews concerne la hausse des prix. Dix ans après son introduction, l’euro reste accusé du délit d’inflation ce qui pouvait se comprendre dans les toutes premières années (effet d’arrondissement et puis perte de repère de la part des consommateurs), mais qui aujourd’hui n’a plus guère de sens d’autant que sur dix ans hausses et baisses des prix à la consommation s’équilibrent plus qu’on ne le pense. Sur dix ans, les prix des produits alimentaires ont certes augmenté, mais ceci est lié à la hausse des prix des produits agricoles à partir de 2006 et à la fin de la PAC. Quant aux biens manufacturés, à l’image de la télévision à écran plat ou du téléviseur, leurs prix n’ont cessé de diminuer grâce aux travailleurs… chinois !

          Mais ce n’est que vers la fin de l’interview que l’on peut glisser quand même quelques mérites de l’euro, comme d’éviter le chaos monétaire qu’aurait connu l’Europe en 2008 et encore aujourd’hui. Les gourous, spécialistes du catastrophisme en tout genre « à la Roubini » ne cessent de nous prédire la fin de l’euro. Souhaitons que ce soit là l’erreur d’ignares qui n’ont rien compris au sens de l’histoire !